Balade gourmande en Croatie

Région-carrefour, reflet d’influences des mondes latin, slave, byzantin, finno-ougrien, la gastronomie croate est à l’image de la mosaïque culturelle du pays, carrefour de l’Europe centrale et de la Méditerranée, aux portes des Balkans mais profondément slave, en dépit du rattachement à la latinité romaine. Sachez qu'il existe plusieurs cuisines croates que l'on pourrait partager en trois groupes principaux:

La cuisine continentale dans les plaines du nord
L’art culinaire de la Croatie continentale combine les influences austro-hongroise et orientale. Les spécialités régionales se déclinent comme suit: le visovacka begavica, agneau cuit dans du lait de brebis, les mlinci, beignets plats au goût acide que l’on sert avec de la dinde, et les pâtes aux truffes ramassées en forêt. On retrouve des viandes panées, mais aussi la goulash (gulas), le chou farci (sarma) ou mariné (kiseli kupus) à la manière antique. Les pâtisseries rappellent l’influence autrichienne : strudels, choux à la crème, beignets et gâteaux roulés sont vraiment succulents !

En Slavonie, la spécialité est la charcuterie avec de nombreuses saucisses dont la fameuse kulen, une saucisse pimentée. Dans la région de Zagreb, on prépare des struklis. Peut-être qu'ici ont-ils une saveur particulière ou les consomme-t-on plus fréquemment mais ces petits feuilletés ou ces pâtes (il y en a 2 versions) au fromage, aux pommes, en chapelure ont pris d'assaut le pays tout entier.

La cuisine montagnarde au sud
On y retrouve davantage de soupes et des spécialités à base de légumes, de poissons et fruits de mer, de fromage de chèvre ou de brebis et d'huile d'olive, le tout agrémenté par un grande variété de vins régionaux.

La cuisine méditerranéenne
Sur le littoral Adriatique, la cuisine a des accents méditerranéens et fait la part belle aux plats de poissons. On les retrouve grillés, pochés, en brodetto (soupe de poissons) ou à la gregada. Coquillages et crustacés se transforment en salade d'encornets, huîtres de Ston, moules ou scampis à la bouzzara (miettes de pain, ail, persil, vin et huile d'olive). Les calmars (lignje) sont consommés sous différentes formes : grillés (na zaru), frits ou fourrés (punjenje) et entrent aussi dans la composition du rizotto nature ou à l'encre de sèche. On sent ici que l'Italie est juste en face.

Split
Pour accéder aux 1780 km de la côte dalmate et à ses 600 îles, à ses criques sauvages et à ses palais Renaissance, il vous faudra passer par Split, dont les ferries et les catamarans desservent tout le littoral. La première chose à faire est d'aller flâner sur le quai ensoleillé appelé Obala. Cette agréable promenade bordée de palmiers conduit au port de transit. De vastes terrasses vous permettront de vous imprégner de l'ambiance et de déguster quelques spécialités héritées de l'empire austro-hongrois, comme le café à la crème chantilly. Vous verrez que le palais Dioclétien en bordure du port rappelle combien de générations de marins ont vécu ici. On voit encore des bateaux de pêche minuscules, des filets en train de sécher. Si la présence du cabillaud dans la cuisine dalmate vous semble incongrue, elle traduit bien la curiosité des marins pour ce poisson venu d'ailleurs.

En soirée, prenez le temps de déguster les spécialités et de composer un vrai repas régional. À l'apéritif, vous commanderez une travarica (eau de vie d'herbes) ou un lozovaca (marc de raisin). Commencez les agapes par du pršut (jambon cru de Dalmatie) - Servi avec du fromage de chèvre et des olives, il constitue le principal hors-d’œuvre. Vous pouvez aussi commander: slane srdele (sardines en saumure) ou sir iz ulja (fromage mariné à l'huile). Si la nourriture que l'on mange en été au bord de la mer est en général plus légère, ne soyez pas surpris si on vous propose un bouillon ou une soupe, et ce, même en pleine chaleur estivale ! En plat principal: janjetina (agneau) pecena (rôti) ou kuhana (bouilli), pašticada sa njokima (fricandeau de bœuf mariné accompagné de gnocchis) et laissez-vous tenter par un vin rouge (Postup, Dingac, Faros, Babic) ou blanc (Pošip, Maraština, Grk, Bogdanuša). Terminez par une rožata (sorte de crème caramel) ou des kroštule (lacets de pâte croquante) accompagnés de prošek (vin blanc doux type prosecco), fruit du soleil et du raisin.

Sur la route de Korkula
À perte de vue, le bleu de la mer dans l’échancrure des terres. Plus loin, les parcs à huîtres étalés jusqu’aux côteaux rocailleux, dorés par les derniers rayons du soleil. Au-delà encore, la spectaculaire muraille médiévale, accrochée aux flancs des collines escarpées, qui rejoint le village voisin de Mali Ston. Après quelques verres de grk, (prononcez « greuk »), le patron du restaurant me révèle, dans un éclat de rire, que les huîtres d'ici ont des vertus aphrodisiaques capables de vous entraîner durant 12 jours de folie. Cette huître plate Ostrea edulis étaient si appréciées par Tito, qu'il avait même son parc personnel.

Arrêt à l'île de Pag
Spectaculaire! On a l'impression d'être sur la lune, car on ne voit que des roches blanches et arides, et quelques chèvres qui jouent à cloche-pieds. Et soudain une oasis verte aux brebis blanches. C'est encore dans cette bourgade médiévale, urbanisée en XVIe siècle, que se trouvent les salines de Pag qui produisent cet aliment indispensable depuis les temps romains. C'est ici qu'on fabrique un fromage de chèvre très ferme, appelé paski-sir. Sa saveur très particulière provient de ce que le fromage est roulé dans la cendre et l’huile d’olive avant d’être affiné ; de plus, l’alimentation des brebis locales comprend beaucoup d’herbes sauvages, notamment la sauge. Plus loin, de belles plages aux petits galets arrondis par les vagues, la mer couleur turquoise. Sur la promenade du vieux port, on peut déguster de délicieux poissons grillés accompagnés d'un vin blanc nommé "Gegic".

Hvar - Pique-nique sur un rocher
Cette île est réputée pour être la plus belle et la plus ensoleillée de toutes les îles croates. Un village accroché à la colline, de vieilles pierres qui donne un charme désuet et authentique au paysage. La mer Adriatique est sublime ! Il n'y a pas de plage de sable et les rochers plongent directement dans la mer. On étale sa serviette sous un pin à un endroit où la roche est plate, et, sous la caresse conjuguée de la brise marine et du soleil, on déguste un repas frugal composé de pain, de fromage et de vin. Sur les marchés, vous trouverez du fromage blanc épais (mladi), vendu dans de petits sacs en plastique, qui se mange le plus souvent salé et poivré, accompagné d'une salade. Le fromage de brebis de l'île de Pag, le paski sir est le plus réputé des fromages secs. Quant au namaz, c'est un fromage frais qui peut être parfumé aux poivrons ou aux herbes que l'on tartine avec bonheur.

Autres influences
De manière générale, on peut dire qu'il ne fait pas bon être végétarien en Croatie tant la viande est appréciée et partie intégrante de tous les repas. Elle peut être mangée grillée (pecenje), comme l'attestent les moutons (janje) ou porcs (svinjetina) entiers qui dorent sur les broches des restaurants de bord de route.

La Hongrie se manifeste à travers un goulach au vin, des boulettes de pâte farcie à la viande ou au fromage et quelques desserts, comme le gâteau de fromage blanc et graines de pavot.

Les Ottomans ont laissé en héritage le goût des épices, des viandes hachées assaisonnées d'ail et d'oignons farcis (cevapcici, pleskavica) ou cuites à la broche comme les raznici (shish kebab) ou encore des burek ou des feuilletés au fromage ou à la viande.

Au quotidien
Les habitudes alimentaires diffèrent selon les régions, mais d'une manière générale, on prend un petit déjeuner fort copieux tôt le matin. Le déjeuner, quant à lui, se prend en milieu d'après-midi, car beaucoup de Croates travaillent en journée continue. Le principal repas de la journée est en général composé de viande ou de poisson, de pommes de terre et de riz ou de maïs. Dans les régions côtières, une pause est faite en milieu de matinée pour manger la marenda, un léger repas fait de poisson, de fromage et de pain.