Tout sur la Muscade - Petite Histoire
Origine
les îles Moluques en Indonésie, spécialement les îles Banda
Etymologie
du latin macir qui signifie une écorce aromatique
L'arbre provient des îles Moluques, les îles aux épices, probablement de Ceram dont les habitants l'appellent muscade Banda.
Si Pline parle d'un arbre dont on peut extraire deux épices à la fois, nous ne pouvons prétendre de façon absolue qu'il s'agit de la muscade et du macis mais tout porte à croire qu'il s'agit bien du muscadier car nous avons la preuve que les arabes apportaient ces deux épices dans la riche ville de Constantinople au VI ième siècle.
Au Xlle siècle, un peu partout en Europe, voire même en Scandinavie, l'emploi de la muscade, rapportée par les croisés et les Arabes, se propage à une vitesse fulgurante et prend le deuxième rang au palmarès des épices dès la fin du Moyen-Age, la première demeurant, même de nos jours, le poivre. Les brasseurs avaient trouvé une des principales épices pour parfumer la cervoise, c'est-à-dire la bière dont la consommation était très répandue chez les hommes, les femmes préférant un verre de vin parfumé de la même épice.
On la transportait alors dans une petite boîte d'argent ou de bois dans laquelle il y avait une râpe.
Un parfum brûlant
Dans les rues, on faisait brûler de la muscade pour combattre les odeurs où ruisseaux et rigoles charriaient les immondices. En 1191, on fit brûler une quantité impressionnante de muscade pendant plusieurs jours pour parfumer la Cité éternelle afin d'accueillir dignement le Saint Empereur romain Henri V1 qui venait se faire couronner à Rome.
Pourtant, c'est une épice chère puisqu'un demi kilo coûte
2 siècles plus tard (XIVe)
la valeur de trois moutons
ou d'une bonne vache pas trop vieille
Le monopole hollandais aux îles Moluques
maginez 74 5O5 km2 d'îles séparées de Célèbes par la mer de Banda et la mer des Moluques au coeur de l'Indonésie.
Sur les 7 îles principales aux pics volcaniques, trois sont passées à l'histoire:
* Halmahera, la grande Moluque, représente 2 OOO kilomètres de côtes réparties sur 35O kilomètres de long;
* Céram
* et Amboine.
Partout des girofliers et des muscadiers, poussant comme de la mauvaise herbe sur cet archipel immense du Pacifique. Un rêve de ducats, de florins et de piastres sur pied à chaque mètre de sol.
Terre bénie des dieux, seule les Moluques offrent ces deux épices qui ne poussent nulle part ailleurs, un caprice de la nature qui a jeté son dévolu en plein océan. Il existe bien des sous-espèces en Indonésie mais rien de comparable.
Terre fertile mais aussi champs de bataille, destruction. La muscade et la girofle poussent aussi dans le sang.
Ce sont des horizons inconnus qui, telle une boîte de Pandore, fait surgir devant les équipages épuisés des coups de tabac, des récifs aux mâchoires assoiffées d'épaves, des indigènes hypocrites, des fièvres qui vous emportent l'homme en une nuit, une végétation luxuriante peuplée d'insectes, de plantes qui se vengent de l'étranger en le piquant d'infections pernicieuses. Les expéditions se multiplient, officieuses et officielles.
Voler une noix muscade, c'est mourir avant de l'avoir planté
Les Hollandais, dont l'empire économique et commercial est sans cesse grandissant n'hésitent pas à s'emparer du monopole de la muscade en repoussant, en 16O5, la domination portuguaise. Trop de grands commerçants de la Compagnie des Indes orientales veulent se faire construire une maison sur la canal d'Amsterdam .
Mais comment conserver un tel monopole alors que ces milliers d'îles renferment autant de promesses: ils décident alors de concentrer la culture sur les deux petites îles de Ternate et de Tidore, près de la grande Moluque. On déracine, on arrache, on brûle tous les autres plants de l'archipel, ne gardant qu'une superficie facile à défendre, contrôlée par le mousquet et le canon.Un système efficace et convainquant puisque la Vereenigde Oostindische Compagnie demeurera pendant un siècle et demi le maître incontesté des deux épices les plus chères au monde, soit la muscade et la girofle.
Les Hollandais sont si conscients de leur monopole qu'ils n'hésitent pas à tuer tout voleur de noix muscade car dit noix dit muscadier, dit production, dit concurrence.
Amboine, minuscule avec ses 1O kilomètres, au sud-ouest de la grande île, est prédestinée. C'est là que l'on stocke les récoltes avant qu'elles ne soient embarquées pour l'Europe via Batavia. C'est le coffre-fort de la mer des Indes, comme la surnomme l'historien Vaxelaire. . Rangées en ballot, ces odeurs, les plus chères au monde, attendent les navires marchands dans des hangars de pierre ceinturés par une haie de hallebardiers.
Les récoltes sont précieusement enfermées dans de vastes entrepôts desservis par des caboteurs armés.
Commerçants avant tout, ils n'hésitent pas non plus à brûler l'excédent de la production pour maintenir le cours de la muscade à la hausse sur le marché européen - un incendie à donner le vertige qui a lieu une fois l'an, si besoin est au milieu d'un banquet et d'un bal présidé par le Shandabaer:
Et les habitants dans tout cela? C'est simple et expéditif: ils collaborent en restant tranquilles ou on les tue.
Depuis 151O, les Hollandais sont les maîtres de l'archipel, ces îles de l'épicerie concentrées sur trois îles productrices gardées militairement mais la nature a, à certains endroits, reprit ses droits et quelques jeunes pousses commencent à poindre dans les cendres.
L'histoire de la muscade est indissociable de Pierre Poivre. Grâce à sa ténacité et à ses dons de botaniste, il a brisé le monopole hollandais. C'est une longue histoire qu'il me faut vous raconter, une figure de légende qui donne à ces deux épices toute leur saveur.
Les premières noix sont cueillies à l'Ile de France en 1778, soit sept ans après leur plantation par Poivre. Maigre récolte mais qui progresse et en 1883, Céré peut en expédier à Bourbon et jusqu'à Cayenne.
Quelques années plus tard, le navire marchand l'Alexandre, affrété par d'Entre-casteaux, embarque des plantes à épices pour en porter la culture aux colonies américaines.
Vers 18OO, la France prend la Hollande et, par la même occasion, ses colonies. En même temps, l'Angleterre est en guerre ouverte contre la France et occupe les îles des Indes orientales. La muscade est envoyée dans les colonies britanniques de Malacca et de Ceylan et jusqu'aux Antilles à St-Vincent en 18O2, Trinidad en 18O6 et Grenade en 1843.
Les Hollandais conservent tout de même leur monopole jusqu'à la deuxième guerre mondiale.
Le monopole hollandais s'effrite aux Antilles grâce à la complicité des oiseaux-voleurs
Quelqu'un arrive-t-il à voler une noix non traitée ou à marchander frauduleusement une noix, il est immédiatement passible de la peine de mort, épais de Damoclès qui pend aussi bien aux Moluques qu'aux Antilles
Mais les Hollandais n'avaient pas pensé aux pigeons qui, indifférents aux lois d'exportation, s'envolaient avec une aril dans le bec, grignotaient sa chair et laissaient tomber la noix au gré de leur pérégrination sur d'autres îles de possession étrangère. Ils n'avaient pas pensé non plus à la ténacité d'un Pierre Poivre et à l'envie croissante des Anglais et des Français qui cherchaient désespérément un moyen pour s'approprier cette richesse parfumée.
Les épiceries sont portées au milieu de deux haies de soldats qui sont rangés depuis la porte des magasins jusqu'à celle de l'enclos, dans la forme d'un carré long.
Ce qui fût brûlé en 1772 formait une masse d'environ 1OO pieds de long sur 25 de large et 15 de hauteur, ce qui produit 37 5OO pieds cubes faisant 912 tonneaux de mer.
Blancard Témoin oculaire - Journal de voyage 1772
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